Monsieur le ministre,
Le 30 mars dernier la société Fotolia, banque d’images leader en Europe sur le marché des microstocks, recevait le trophée de l’ACSEL du numérique (Association de l’économie numérique) dans la catégorie Pure Player. Ce trophée a été remis à Fotolia en présence de M. Eric Besson, ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique.
La société Fotolia se définit elle-même comme ayant « pour vocation de démocratiser l’accès aux images et propose des contenus de qualité professionnelle à partir de 0,75 € pour tous types d’utilisation, sur tous supports, sans limite de temps, sans limite géographique, et ce, quel que soit le nombre de diffusions ».
Monsieur le ministre, vous avez signifié publiquement l’été dernier votre engagement face à la précarisation des photographes professionnels confrontés – entre autres – à de telles pratiques qui méprisent ouvertement le droit d’auteur et le code de la propriété intellectuelle.
Que la société Fotolia reçoive quelques mois après un trophée pour être devenu le champion de cette philosophie nous semble un signal catastrophique dans une situation qui l’est déjà suffisamment.
Le 31 mars 2011, au lendemain de la remise de ce trophée, la société Fotolia diffusait un communiqué de presse affirmant « En permettant aux entreprises d’utiliser des images dans des contextes professionnels pour quelques euros seulement nous avons permis l’émergence d’une nouvelle demande jusqu’alors inexistante en raison d’une barrière prix trop élevée. Les acheteurs sont donc plus nombreux, les achats plus fréquents, assurant ainsi aux auteurs des revenus plus importants », ce qui constitue un mensonge éhonté.
Venait ensuite, tout naturellement, ce que l’association PAJ (et d’autres associations professionnelles avec elle, notamment l’UPP) considère comme une insulte inacceptable faite à la photographie et aux photographes contre laquelle nous demandons au ministre de la culture et de la communication que vous êtes de réagir : « (…) La société a réussi à « assainir » le marché en apportant une réponse adaptée aux besoins des entreprises et des créateurs de contenus (…) ». Cette terminologie au sinistre relent caractérise un mépris affiché vis-à-vis des acteurs culturels que nous sommes, lui aussi d’un autre temps.
Veuillez recevoir, Monsieur le ministre, l’expression de notre plus haute considération.
Mario Fourmy
Président de PAJ
3 comments
christian lionel-dupont dit:
22 Avr, 2011
Bravo Mario
Il fallait reagir face aux sourires et aux promesses du ministre de la culture. C’est tout et son contraire . Rien a perdre il faut reagir
Christian MLD
Kubler dit:
28 Avr, 2011
Comme toujours deux poids deux mesures quant il s’agit de l’eldorado internet.
Quelques miettes de rémunération des auteurs de la part de Fotolia pour ne quand-même pas avoir l’air de trouver normal que certains “bossent gratis”!
Quant à l’argument de la “démocratisation”, il à bon dos quant c’est de profit maximum qu’il s’agit.
La photo coûte de l’argent? La démocratie justement étant garante de l’accès à l’information, il serait
peut-être temps d’expliquer intelligemment au client l’investissement personnel, journalistique et financier des photographes qui permet l’existence d’une photo. Celui-ci, moins bête qu’il n’y parait comprendrait certainement que les images qu’il achète ne sont finalement pas si chères.
La photo d’un professionnel c’est bio!
La balle est maintenant dans le camp du Ministre (plutôt invisible) de la culture, saura-t-il marquer des points?
Bravo pour ce courrier très légitime et clair sur la situation.
Inès K
Claire dit:
30 Mai, 2011
Réaction à une situation donnée… C’est étonnant comme les gens ont la mémoire courte et comme on manque de vision à long et moyen terme… L’un dit quelque chose et on l’approuve, on trouve ça bien, puis il dit son contraire et personne ne pipe mot, c’est déjà oublié. Alors merci à vous de relever l’incohérence de cette situation dommageable.
Permettre à plus de monde d’avoir accès à de nouvelles images et avoir la possibilité de vendre plus facilement ses créations est une bonne chose en soi. Par contre, il y a de quoi s’élever contre le non respect des droits d’auteurs et les images au rabais vendues par des sociétés qui prospèrent sans vergogne. L’art, ou tout autre savoir-faire a un prix et la course au moins cher possible tout de suite guide notre économie actuelle, puisque on veut bien dépenser pas mal d’argent pour des gadgets mais pas pour des photographies ou des musiques.
Mais au fait, monsieur le Ministre, qu’en est-il de l’éducation à cette dimension de respect de la création et des auteurs et créateurs ? Il y a vraiment de quoi faire !
Merci aux journalistes, aux historiens ensuite de replacer les évènements dans l’ordre, de nous faire cette lecture des évènements. On a besoin de vous car nous avons la mémoire bien courte…